Je n’ai pas eu beaucoup d’échos publics à propos de mon texte sur les bandits à cravate de la Tarosphère, ceux que j’appelle également les vendeurs d’huile de serpent. La corruption est tellement intégrée dans les mœurs de notre époque… Je comprends qu’il est tentant de baisser les bras. Et puis… Les charlatans sont aussi, souvent, leurs premières victimes. On peut de bonne foi vouloir soulager la misère humaine et n’ajouter qu’encore plus de confusion dans le monde, dans sa propre vie … en tentant éternellement de se justifier.
C’est le thème d’un roman de Henning Mankel, Innan frosten. Je vous résume la pensée de l’auteur ? Citons le plutôt, dans la version en français.
Le héros, Kurt Wallander, dialogue avec une théologienne appelée comme experte dans une enquête policière.
Sofia Hanke :
»Il était une fois une fille de ferme l’Ostertgotland qui s’est mise à prêcher après avoir eu des visions. Elle a fini par être enfermée chez les fous. Mais il y a toujours eu des gens de cette trempe, des fanatiques qui choisissent ou bien de mener une vie de prêcheur solitaire ou bien de rassembler tant bien que mal une cohorte de fidèles. La plupart d’entre eux sont sincères, ils agissent de bonne foi et sont persuadés d’être mandatés par Dieu. Bien entendu, il existe aussi des escrocs, qui pratiquent ce qu’on peut appeler une foi de représentation. Il s’agit souvent de gens en quête d’argent ou de privilèges sexuels. Là, on peut vraiment parler d’instrumentalisation de la religion, en tant que piège destiné à capturer des proies. Mais les escrocs sont minoritaires. La plupart de ces prédicateurs, aussi fous soient-ils, sont animés par la bonne volonté et par des convictions sincères. S’ils commettent des actes répréhensibles, ils trouvent toujours un moyen de les défendre devant Dieu (…)
Ou devant leur conscience.
Avant le froid, aux pages 543-44.